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Escapades.

2 décembre 2024

Pascal-Etienne.

Pascal-Etienne.

Pour le Défi du Samedi. Le mot à insérer dans le texte : HISTRION.

 

Cette fois c'est la fin des haricots ! Avec un « h » aspiré comme Bourvil quand il les chante. N'est ce pas Walrus ? Histrion. En lieu et place de haricot. Bon. Vous voulez que je vous parle de mon grand-père maternel Pascal-Etienne, c'est ça ? Un fameux histrion le bonhomme. Non. Ce n'est pas ce que vous croyez. Mon pépé n'était pas un fanfaron, un pitre. Si on avait dit ça à cet ancien poilu, il aurait immédiatement pris la mouche. Et on aurait vu ce qu'on aurait vu ! Pourtant il se la jouait un peu le grand-père avec son képi et son tambour. Un peu cabotin tout de même ! Mais oui Pascal-Etienne était garde champêtre de son état.

 

C'est beau cette appellation « garde champêtre » . Bucolique. Plein de poésie. Dans la catégorie serviteur de la République on pense immédiatement au sous-préfet aux champs de Daudet. Mais pépé n'était pas un poète ça non. Il était très sérieux et strict dans l'exercice de ses fonctions. Assermenté qu'il disait. Et bien sûr c'était la vérité. Chargé par le préfet et le maire de faire régner l'ordre dans la commune de ma naissance et de mon enfance.

 

Pourquoi donc ai-je pensé à lui en voyant la photo postée par notre ami ? Je l'ai tout de suite revu perché sur la pierre ronde et assez haute qui se trouvait sur la place de l'église, juste à gauche du porche. Je pense qu'elle avait été disposée à cet endroit exprès pour le garde comme on l'appelait. Peut être même que c'était lui qui en avait fait la demande. Pas beaucoup de sorties de ce temps. On allait à la messe le dimanche. C'était bien le seul moment où l'on trouvait un peu de distraction. Si l'on peut parler de distraction. Parce que souvent on avait droit aux sermons du curé.

 

Et à la sortie ? Le garde était là, sûr de lui et de ses pouvoirs pour vous en infliger un autre à sa manière. Il avait coiffé son képi, ajusté autour de son cou la lanière en cuir qui portait son tambour, accroché ses médailles à sa veste. Il fallait rappeler que ses fonctions de policier municipal avant l'heure il les devait à sa conduite exemplaire durant la guerre de 14/18. Bien placé pour ne rater personne, il surveillait du coin de l'œil que pas un citoyen, homme, femme ou enfants ne prenne le large. Surtout les enfants d'ailleurs. Quand tout le monde était tourné vers lui, pépé se saisissait de ses baguettes et frappait sur son tambour d'un air pénétré.

 

Avis à la population criait-il. Il déroulait alors son affichette et lisait les informations contenues. Elles concernaient principalement les affaires communales en cours, les décisions du conseil municipal et les manifestations à venir. Ensuite, il enroulait consciencieusement son papier et le remettait dans sa poche. Et c'est là que les garnements tentaient d'échapper à son regard perçant.

 

Après avoir accompli sa mission en français, il reprenait, afin d'être bien compris de tous le patois occitan pour faire part de ses griefs. Et ils ne manquaient pas. Sans jamais citer personne il faisait comprendre à certains qu'il ne fallait pas le prendre pour un imbécile parce qu'il pouvait sévir et dresser procès verbal. Ce qu'il ne faisait pas généralement mais attention de ne pas l'asticoter trop longtemps.

 

Ensuite, il descendait de son perchoir et s'approchait d'un pas décidé de la bande de polissons que nous étions, ses petits enfants y compris. Rien ne l'empêchait de tirer une oreille ou de nous abreuver de menaces. Évidemment, dès qu'il avait le dos tourné, les rires fusaient et les chansons de mal appris aussi. Mais pas trop fort.

 

Un drôle de boulot le travail de garde champêtre. Qui prenait beaucoup, beaucoup de temps à mon grand-père. Beaucoup trop de temps au goût de mes parents. De mon père surtout à qui il manquait des bras pour accomplir le travail de la ferme. En général, on venait le chercher à l'heure du repas de midi pour être sûr de le trouver à la maison et ne pas perdre l'occasion de boire un coup. C'était le plus souvent pour des querelles de voisinage : vaches mal gardées dont les dégâts étaient préjudiciables pour le plaignant, volailles soit disant volées etc. Il y avait aussi le bornage. Les bornes délimitant les terrains faisaient la plupart du temps l'objet des déplacements du garde à travers notre petite commune.

 

Pascal-Etienne, toujours fidèle à son serment enfourchait sans plus attendre sa bicyclette et on ne le revoyait pas de la journée. Quand il rentrait, il avait abandonné l'honneur dans son képi et l'avait remplacée par quelques verres de rouge ou de gnole. C'était un brave homme mais dans ces moments là il valait mieux qu'il aille se coucher pour éviter les débordements en paroles et en actions.

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2 décembre 2024

La guilde des râpées.

La guilde des râpées.

Pour le Défi du Samedi. Le mot à insérer dans le texte : GONFARON.

Après réflexion et fait un choix parmi les diverses corporations qui fleurissent dans ma chère Corrèze, je vais vous introduire aujourd'hui dans la confrérie de la farcidure et du millassou. Il faut dire qu'elle vient de fêter ses 20 ans d'existence cette année. Et vous pouvez admirer son superbe gonfalon aux couleurs «   bleu royal et jaune d'or. »  Il n'a rien de glorieux mais comme le souhaitent les membres de la confrérie, il reflète le symbole de l'amitié, du bien vivre et bien manger. La moindre occasion est bonne chez eux pour faire ripaille entre copains. Ce qui n'empêche pas leurs actions caritatives, notamment auprès de l'hôpital de la préfecture, en pédiatrie.

Ces couleurs éclatantes sont évidemment celles du blason de sa commune de naissance : Sainte Fortunade. Les initiés portent aussi la cape et le béret aux mêmes coloris et autour du cou arborent la précieuse médaille retenue par un ruban dont la teinte varie selon le grade : Grand Maître, Grand Argentier, Officier, Chevalier...

 

Voilà justement que ces dignitaires se sont manifestés sur la place de la Guierle lors de la célèbre Foire du Livre briviste fin de semaine dernière. Ils ont à cœur de faire connaître – et déguster – leurs deux plats typiquement corréziens : la farcidure et le millassou.

 

Vous m'en voudriez si je ne vous donnais pas un aperçu de leurs recettes à base de pommes de terre râpées. Ce sont des gourmandises pour moi et pour bon nombre de corréziens et je crois pouvoir affirmer que les « étrangers », y ayant goûté en redemandent. J'en connais beaucoup.

 

La farcidure : se munir d'un grand factotum – tiens pour me faire pardonner de ne pas avoir participé samedi dernier – (c'est bien l'étymologie de ce mot non : fait tout.) Donc verser de l'eau dans un faitout. Porter à ébullition. Ajouter un beau morceau de petit salé sorti de son saloir – je préfère quelques côtes en un seul tenant – et une andouille. Pendant ce temps éplucher et râper des grosses pommes de terre, Bintge de préférence. Confectionner un hachis avec oignon, ail, persil et autres herbes. Poivre. Pas de sel bien sûr ! Façonner des boules avec les râpées et insérer à l'intérieur un peu de farce et un petit morceau de lard. Les mettre à cuire, entourées d'une feuille de chou - ou pas - dans le bouillon après avoir retiré les viandes. Les déguster avec les salaisons. Il y a un tour de main à prendre pour que les boulettes ne s'écrasent pas. Mais ça c'est une autre histoire !

 

 

Le millassou : j'en prépare souvent. C'est beaucoup plus facile et délicieux. Il faut donc éplucher et râper des pommes de terre – ici peu importe l'espèce – Ajouter un œuf, des petits morceaux de lard, beaucoup de persil, ciboulette, sel et poivre, un peu de muscade et de la crème fraîche. Bien mélanger et verser dans une poêle où l'on aura chauffé de la graisse de canard. Retourner plusieurs fois sur un couvercle jusqu'à ce que les deux faces soient bien dorées et croustillantes. L'intérieur se doit de rester moelleux. A déguster avec un civet pour un repas plus élaboré ou tout simplement avec une salade verte.

Et après ces mets roboratifs comment pensez vous que le repas se termine ? On change de confrérie et on rend visite à celle des croqueurs de pommes pour acheter de quoi faire une belle flognarde.

A quoi ça nous mène un gonfaron quand même !

20 novembre 2024

En Harley Davidson.

Pour le Défi du Samedi. Le mot à insérer dans le texte : DECIBEL.

Suite de "Une héritière anglaise".

 

En Harley Davidson.


 

Une pétarade soudaine interrompt la conversation entre Marco, le patron du bar et l'Anglaise venue patienter ici pour son rendez-vous. Une moto rutilante, dont les décibels s'élèvent à un tel niveau que chacun des deux répriment une grimace, déboule dans un train d'enfer sur la place du village. La Harley – car c'en est une – s'arrête tout près de la voiture blanche. Son pilote, parfaitement équipé comme il se doit, met pied à terre, se débarrasse de ses gants et de son casque. Il passe machinalement une main dans ses cheveux et entre résolument dans le café .


 

- Bonjour M'sieur Dame.

Après un rapide regard circulaire il se dirige vers la table devant laquelle est installée la jeune femme. Cette dernière se lève, émue et s'approche de celui qu'elle attendait.

  • Bonjour David. Ça fait tellement longtemps... Je n'ai pas pu venir pour l'enterrement de grand-mère. Comme tu l'as sans doute appris j'ai été gravement malade et...

  • Je sais Jane. Ne sois pas désolée. Grand-mère se faisait du souci pour toi. Elle n'aurait pas voulu que tu sois présente. Mais tu vas mieux maintenant ? Tu es resplendissante.

  • Oui. Je vais bien. Et toi ? Que deviens-tu ? Tu n'as guère changé depuis nos années d'adolescence. Tu es marié je crois.

  • Fraîchement divorcé. Sans enfant. Tu vois : libre comme l'air. Et toi ? Je veux dire : tu as une famille en Angleterre ?

  • Non. Mon goût pour la liberté a été le plus fort. Depuis la mort de ma mère, plus rien ne me retient à Londres. Aussi j'ai l'intention de profiter des largesses de notre grand-mère et de m'installer dans sa maison. C'est pour cela que je t'ai demandé de m'apporter la clé ici parce que je ne connais pas vraiment ton adresse. Je n'ai que le numéro de portable noté quand tu m'as appris le décès d'Henriette.


 

Marco observe le couple mine de rien et soudain, il ressent la gêne du jeune homme. Celui- ci lui décoche un regard oblique et demande à sa cousine si elle peut l'accompagner à l'extérieur. Ils commandent au barman des bières et partent s'installer en terrasse à l'abri d'oreilles indiscrètes.

- Vraiment Jane ? Tu penses vivre ici dans ce village pommé ?

- Mais oui. J'y serai très bien et je pourrai exercer mon métier facilement. Je suis naturopathe et je soigne aussi par les plantes. Comme grand-mère. J'ai hérité de certains de ses dons également. Ses deux grands jardins me seront très utiles pour mes cultures.

- De quels jardins parles-tu ? Des terres qui entourent la maison ? Mais ces parcelles sont à moi Jane. Tu n'as donc pas lu l'acte que l'étude notariale t'a envoyé ?

    • Non. Les volontés de grand-mère écrites de sa main dans la lettre que voilà sont les plus importantes à mes yeux.

    • Bien sûr Jane. Je comprends mais cela ne suffit pas. Il y a des lois et je suis co-héritier d'Henriette avec toi.

    • Écoute David. Je pense qu'avec ton métier d'ingénieur ces terres ne te sont pas utiles. Tandis que pour moi...Je peux te les racheter si tu n'es pas trop gourmand.

    • Je ne veux pas vendre Jane.Tu te trompes chère cousine : ces terrains m'intéressent. J'ai décidé d'exercer ma profession à mi-temps puisque cela m'est actuellement possible et de me lancer dans la permaculture.

    • Ah ! On peut peut être s'arranger ? Je n'aurai pas besoin de beaucoup de place et si tu veux je te paierai un loyer.

    • Bon. Il faut que nous en discutions. En attendant, je te propose d'aller sur les lieux. Que dirais-tu d'un petit tour de moto ?

    • Une moto cet engin ? Plutôt un avion de chasse oui. Mais pourquoi pas ? Soyons fous.

20 novembre 2024

L'héritière anglaise.

Pour le Défi du Samedi. Le mot : constellation.

 

L'héritière anglaise.

 

Marco regarde à la dérobée cette femme installée dans son bar depuis presque une heure. Grande, maigre, elle affiche une bonne quarantaine d'années. Elle ne le dérange pas. D'ailleurs elle lui a poliment demandé si elle pouvait attendre chez lui. Il lisait tranquillement son journal quand elle est entrée. C'est à ce moment là qu'il a vu cette petite voiture blanche immatriculée en Grande Bretagne, garée juste en face sur la place du village. Il y a très peu de touristes en cette fin octobre. Sûrement, ce véhicule lui appartient. Et puis, même si elle s'exprime très bien en français elle parle avec un accent assez prononcé. Il en conclut qu'elle est anglaise. Ils sont légion à posséder une résidence secondaire dans le pays. Il n'est pas étonné outre mesure. Mais alors que fait elle chez lui ? Qui attend-elle ?

 

Elle commande une autre tasse de thé et se ravisant, avec un sourire, propose à Marco d'apporter carrément une théière sur sa table. Un grand calme règne dans la salle en ce jour de semaine. Les habitués du matin venant lire les nouvelles fraîches en buvant un café ou un verre de blanc sont rentrés chez eux. Ce n'est pas encore l'heure des joueurs de pétanque ou de belote. Ils viendront après leur sieste. Ils ne sont que tous les deux en ce début d'après midi.

 

Marco dépose devant sa cliente une grosse théière fumante et aussitôt elle se sert sans tenir compte du geste du patron voulant échanger sa tasse contre une propre. Elle lève la tête pour s'excuser. Elle le remercie aussi gentiment. Marco ne peut s'empêcher de la dévisager. Il avait déjà remarqué sa chevelure cuivrée flamboyante, sagement ramenée en un chignon simple sur la nuque. Sur son visage au teint laiteux une constellation de taches de rousseur lui donne curieusement un air de jeunesse. Mais ces yeux. Ces yeux d'un vert incroyablement intense et profond. Marco se détourne, troublé et regagne sa place derrière son comptoir. Il est certain d'avoir déjà rencontré de tels yeux. Mais chez qui ? Mais où ?

 

Son regard se porte sans cesse sur cette femme. Elle l'intrigue. Pourtant, elle se comporte naturellement, prend à intervalles réguliers son téléphone, le repose après l'avoir consulté brièvement, contemple sans les voir vraiment les marronniers du square voisin, se tourne de temps en temps vers la porte d'entrée, boit son thé en croisant et décroisant ses longues jambes. Tout ceci calmement et sans hâte. Elle vient de sortir de son sac une pochette plastifiée d'où elle extrait divers papiers dont une lettre manuscrite. Elle la lit attentivement et on sent l'émotion la gagner. Elle interpelle soudain Marco. Ce dernier, surpris, se rapproche de sa cliente. Il comprend qu'elle a envie de parler.

- Excusez moi. Vous connaissiez ma grand-mère ?

  • Peut être. Elle habitait le village ? Qui était elle ?

  • Madame Barnisse. Henriette Barnisse. (ah les yeux verts, bien sûr : Henriette...)

  • Henriette ? Je la connaissais très bien. Elle ne venait pas au bourg. Le facteur, l'épicier ou moi même faisions ses courses.

  • Pourquoi restait elle à l'écart du monde selon vous ?

  • Elle était assez sauvage votre grand-mère. Et... je peux vous le dire, les gens la croyaient un peu sorcière. Aussi, et ce n'est pas très bien, ils l'évitaient. Sauf quand ils avaient besoin d'elle pour soigner leurs maux. Elle s'y entendait Henriette, pour enlever le feu, réduire une fracture, faire cicatriser des plaies... De plus, elle ne voulait pas être payée et cela arrangeait bien voyez vous. A peine si on lui était reconnaissant pour ses services.

  • Je sais tout cela. Même si nous ne nous voyions presque pas. Elle m'écrivait beaucoup cependant. Vous devez vous poser des questions et vous demander ce que je fais ici. Henriette m'a légué sa propriété et ses jardins. Un cousin doit me rapporter les clés de sa maison. C'est à lui que j'ai donné rendez vous chez vous. Je vais m'installer ici pour exercer mon métier de naturopathe. Je soigne également par les plantes et j'ai quelques dons. Comme ma grand-mère. Croyez vous que je serai la bienvenue ?

25 octobre 2024

D'où l'importance de la bergère.

D'où l'importance de la bergère. (Suite de mésaventure champignonesque)

Pour le Défi du Samedi. Le mot à insérer : bigoudi.

P/ - Tu peux rire espèce d'idiot. Aide moi plutôt...

J/ - Tu crois quand même pas que je vais venir te chercher ?

M/- Hep vous là bas !

Paulo voit arriver en face de lui une femme attifée d'un pardessus à la Colombo brandissant un gros gourdin. Il n'en mène pas large et pense que les ennuis vont commencer. Comment se sortir de ce guêpier ? Évidemment, Jacky a disparu.

M/- Je vous parle : qu'est ce que vous faites chez moi ?

P/ - Pardon Madame...

M/- Vous étiez deux tout à l'heure. Où est passé votre copain ?

P/ - Il est parti de l'autre côté du pré. C'est vos chèvres ?

M/- A qui voulez vous qu'elles soient. Il n'y a personne ici à part moi. Je vous écoute : pourquoi c'est plein de cèpes écrasés dans l'herbe ?

P/- Ben...Mais... C'est les chèvres. A cause du bouc...

M/- Bêêê ! Mêêê ! C'est qu'il bêle mieux que mes biquettes celui-là !

La bonne femme se moque mais ne quitte pas Paulo des yeux. Il voit bien qu'elle n'a pas peur. Qui sait ? Peut être est elle armée ? Finalement, Jacky avait raison : qu'est ce qu'on est venus foutre ici ?

M/- Alors ? J'attends. Il a fait quoi mon bouc ?

 

Voilà Jacky. Il a dû contourner le bois de sapins. Paulo respire un peu mieux.

J/- Bonjour Madame. On va vous expliquer...Comme on traversait votre pacage, le monsieur à cornes nous a attaqués.

M/- Bien fait. Déjà vous n'aviez rien à faire là. Et puis mon Bigoudi n'aime pas les hommes. Des fois qu'ils s'en prendraient à ses femelles...Vous avez compris non ? Avec les femmes il est doux comme un agneau. Vous allez voir. Bigoudi ! Bigoudi ! Viens ici avec maman.

 

Jacky et Paulo se regardent et réfrènent une forte envie de rire malgré la situation peu avantageuse pour eux. Le bouc, la barbichette arrogante s'approche, toise les deux amis puis se frotte à sa maîtresse qui semble insensible à son épouvantable odeur.

J/- Euh ! Pardon. Vous êtes la sœur de Louis ?

M/-Vous connaissez Louis ? Je parie que c'est lui qui vous envoie. Quand il peut me mettre la misère celui là, il n'y manque pas. Ne me parlez pas de cet abruti qui m'a mise sur la paille en bouffant tout l'héritage de nos parents. Que les yeux pour pleurer il m'est resté ! Et mes chèvres heureusement.

P/- Non. Ce n'est pas Louis qui nous a envoyés chez vous. C'est juste une coïncidence. On ne l'aime pas nous aussi. Il n'arrête pas de nous causer des problèmes.

J/- Mais on se venge vous savez. Pas méchamment mais on ne laisse pas passer.

M/-Tant mieux ! Venez jusqu'à la maison tout me raconter. Je m'appelle Marinette. Avant, vous allez m'aider à changer mes bêtes de parcelle. Vous tombez bien tiens et vous me devez bien ça. C'est toujours un peu difficile pour moi toute seule de guider le troupeau à travers les chemins. Quelquefois mes filles sont enragées et Bigoudi et moi avons du mal à en venir à bout.

P/- Je veux bien vous rendre service Marinette mais s'il vous plaît, gardez votre animal près de vous. Au fait :  pourquoi vous l'appelez Bigoudi ? C'est un drôle de nom pour un bouc !

M/- Ah regardez le beau toupet cranté qui frisotte entre ses cornes. On croirait que je lui ai fait une mise en plis non ? Et puis c'est rigolo Bigoudi. Il le porte bien je trouve.

 

Marinette rit tout en appelant ses bêtes. Paulo et Jacky acceptent de lui donner un coup de main. Puis, invités par la bergère ils se rendent chez elle boire un café. Et bien sûr, comme elle l'a demandé ils ne se font pas prier pour lui confier toutes les péripéties occasionnées par son frère. Mais aussi leurs vengeances quelquefois cocasses ce qui fait jubiler la frangine de Louis.

 

M/- Je suis contente finalement d'avoir fait votre connaissance. Revenez quand vous voulez chercher les champignons chez moi et surtout faites en sorte que ce corniaud de Louis le sache. Vous n'allez pas repartir sans cèpes aussi. Je vous donne ma cueillette de ce matin. Regardez comme ils sont frais et parfumés. Et puis voilà une clayette de cabécous à vous partager. Bonne route et à la prochaine  les amis ! Drôle de bonne femme songent les amis en question ! On reviendra.

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24 octobre 2024

Mésaventure champignonesque.

Pour le Défi du Samedi. Le mot à insérer : AUTOMNE.

Mésaventure champignonesque.

 

Vous connaissez peut être Paulo et Jacky, mes voisins et leurs histoires de truffes. J'ai raconté ici leurs déboires. Pour changer un peu de genre les deux amis ont décidé de faire comme tout le monde – ou presque - ici : aller chercher les champignons. Champignon = cèpe en Corrèze je le précise. Au téléphone :

  • P /Ho Jacky ? Ça roule ?

  • J/ Ouais. Je sais pourquoi tu m'appelles Paulo. On y va quand ?

  • P/ Il ne faut pas tarder. C'est le plein moment. Hier le Dédé de Virevialle m'a dit qu'il en avait ramassé plus de10 kgs sur le plateau de Millevaches.

  • J/ 10 Kgs ? Pétard ! Où ça exactement ? Il exagère toujours mais quand même ...

  • P/ Hé. Vers Meymac pardi. Au mont Bessou. Tu connais toi ?

  • J /Non. Mais on trouvera bien un coin. Tu conduis ?

  • P/ Écoute. Je préfère que tu prennes ton 4x4. On pourra se garer dans les bois plus facilement. Il vaut mieux ne pas stationner sur le bord de la route. A cause du risque de pneus crevés tu comprends.

  • J/ D'accord. C'est pour demain matin ?

  • P/ Oui. Je demande à ma Josette de nous préparer un bon casse croûte. Tu passes me prendre tôt. Vers 6 heures, ça te va ? On a bien une bonne heure de route. Et il vaut mieux être opérationnel au lever du jour si on veut en trouver avant tout le monde.

  • J/ OK ! A demain.

Ce sera une belle journée d'automne. Parfaite pour l'expédition des deux amis. Ils ont garni le coffre du 4x4 de clayettes, de poches, de paniers. Sans oublier l'attirail nécessaire : bottes, bâtons et couteaux. Et la glacière pour le réconfort. Les voilà partis, excités comme des pous. Cependant, durant le trajet Jacky semble un peu soucieux.

- J/ C'est bien beau ça Paulo. Mais on n'est pas chez nous par là haut. Et si on se fait sortir ? Ils ne sont pas bien fins. T'as qu'à voir le Louis, natif de par là. Tu sais bien qu'il a la gâchette facile...

  • P/ Ah mais j'y pense justement ! Sa frangine élève des chèvres dans ces coins. A Ambrugeat

  • je crois. On va aller à Ambrugeat. Si on a des soucis, on dira qu'on est des amis de Louis. Hum !

  • J/ Et si on lui demandait de venir avec nous ? Il ne refusera pas une petite virée. Et on ferait d'une pierre deux coups : on se rabibocherait avec lui et on serait couverts.

  • T'es malade ? Non. Non. Laisse Louis où il est. On arrive.

Les compères trouvent très vite un bois qui leur semble approprié. Ils se garent au bord d'une piste dans un endroit désert et tranquille. Rapidement, ils s'équipent et partent à l'assaut de la forêt de pins qui s'étire devant eux en prenant soin de ne pas s'éloigner l'un de l'autre. Ils ont eu le nez fin : leurs paniers se remplissent sans tarder et ils doivent aller vider leurs belles trouvailles brunes et odorantes dans la voiture.

Mince. Un os. Il va falloir franchir une clôture, traverser un pré, sauter par dessus une autre clôture pour regagner leur véhicule. Il y a bien un gros troupeau de chèvres dans le fond du pacage. Pas de panique : les chèvres, c'est inoffensif. Paulo et Jacky se disent que ce doit être celui de la frangine de Louis. Ils enjambent le premier obstacle sans problème et entreprennent de parcourir la prairie, leurs précieux fardeaux au bras.

Une galopade juste dans leur dos. Ils se retournent. Un grand bouc blanc stoppe net, gratte furieusement la terre avec ses sabots, se cabre sur ses pattes arrières, baisse la tête et fonce sur Paulo, cornes en avant.

- Oh p. foutons le camp de là beugle Jacky qui court sans demander son reste en direction de la voiture. Il laisse la moitié de son pantalon sur le fil de fer en escaladant la seconde fermeture du pré. Tant pis.

Paulo, toujours aux prises avec l'animal encorné, tombe à la renverse, se relève tant bien que mal et dans l'affolement, rebrousse chemin à toute vitesse. Sans s'en rendre compte, il est revenu au point de départ.

Jacky s'étrangle de rire en voyant que Paulo, complètement déboussolé, va devoir recommencer le périple. Pendant ce temps, le troupeau accouru piétine avec entrain la récolte de cèpes. Jacky, peu charitable chantonne à l'intention de son comparse : « et maintenant que vais-je faire ? »

26 septembre 2024

Phare...farfelu.

Phare... farfelu.

 

Tout comme son magnifique beffroi fait la gloire de Bruges et des Brugeois, le phare de la Guierle à Brive la Gaillarde fait la fierté de la ville et celle des Brivistes. Moins imposant. Moins majestueux. Bien plus simple mais tellement plus insolite ! Un phare près de Bruges, celui de Zeebruges, quoi de plus normal en somme puisque la Mer du Nord est toute proche. Mais à Brive ? A 200 kms de l'océan ? C'est une plaisanterie. Mais non. Notre bonne ville s’enorgueillit de posséder un phare.

 

Il fut décidé au 18 ème siècle d'assécher les marécages autour du cœur de la cité et de canaliser les eaux des treize bras de la Corrèze dans un chenal. Au bord de ce dernier on résolut d'édifier en 1834 un château d'eau destiné, grâce à une machine élévatrice et un filtre à sable à alimenter les diverses fontaines de la ville. Les plans furent confiés à l'architecte Monsieur Limousin et le maître d'œuvre n'était autre que...Monsieur Corrèze. Cocasse n'est ce pas ?

 

Comment naquit ce phare ? Pourquoi cette drôle de conception ? On ne le saura jamais vraiment. Certains documents évoquent la passion des créateurs pour l'histoire et la préhistoire. Naturellement la mer était bien présente ici en des temps reculés. Peut être la nostalgie du grand large ou simplement un clin d'œil, d'aucuns disent égrillard. Bref. Tout comme ses cousins de l'Atlantique un gardien y vivait, chargé de la surveillance des machines servant à pomper l'eau. Un vrai phare quoi auquel ne manquait et ne manque encore que la caresse des vagues.

 

Bien sûr, il ne sert plus aujourd'hui de château d'eau mais abrite l'office de tourisme. Sa tour de plus de 22 mètres est flanquée, tout en haut, d'une tourelle en poivrière à laquelle on accède par un escalier en colimaçon. Là, la vue sur la Halle Georges Brassens ( souvenez vous des gaillardes et de leurs bottes d'oignons) le théâtre, les ruelles du centre historique de la ville, est imprenable.

On peut y admirer, les jours de marché les couleurs chatoyantes des étals regorgeant de légumes, de fruits, de volailles, de charcuteries diverses, enfin des bons produits du terroir et les spécialités corréziennes, lotoises et périgourdines. On parle fort, on s'interpelle joyeusement. L'accent du Sud Ouest, authentique et chantant monte et parvient jusqu'en haut.

Pendant les Foires Grasses, si on se penche un peu du haut du sémaphore l'odorat est tout à coup submergé d'effluves provenant de truffes, foies gras, confits et autres gourmandises à faire pâlir d'envie les fines bouches.

 

Naturellement, je n'oublierai pas de parler de la Foire du Livre de novembre qui se déroule juste là, sur la place de la Guierle où auteurs reconnus ou non – à Brive nous ne sommes pas sectaires – et célébrités (hélas) viennent s'encanailler, le soir venu, au Cardinal, la boîte de nuit toute proche qui porte le nom du pont sur la Corrèze, porte d'entrée principale de la ville. Je puis vous assurer que notre phare en questionne plus d'un ! Et cela fait sourire les Brivistes qui aiment bien faire preuve d'autodérision.

6 août 2024

Mademoiselle Coco.

Ecrit pour le Défi du Samedi d'après une photo de Walrus.

Mademoiselle Coco.

 

 

Gabrielle peste en ce matin de mai. Elle doit faire attention à sa jupe qui l'entrave et l'empêche de grimper prestement au-dessus de l'abbaye. Elle regrette le temps où son père lui permettait d'enfiler un pantalon de son frère Alphonse pour l'aider à pousser sa charrette de camelot de marchés en marchés. A cette évocation, Gabrielle sent sa colère monter. Pourquoi son père les a t elles elles abandonnées, ses sœurs et elle ? Elle pense qu'il s'est débarrassé d'elles. Oui, c'est cela : il les a laissées à l'orphelinat d'Obazine, en Corrèze après la mort de leur mère sans se préoccuper de leur devenir. Comme si ce n'était pas assez de chagrin d'avoir perdu leur maman. Il aurait pu se débrouiller autrement songe la jeune fille avec rancœur. Mais il a préféré sa liberté. Qu'il aille au diable !

 

Gabrielle a 15 ans en cette fin de siècle. Mince fille brune, au corps androgyne, elle longe le canal des Moines qu'elle connaît parfaitement. Elle aime sa fraîcheur, le bruit léger de l'eau qui court. Elle se sent bien ici, seule dans cette Nature sauvage. Elle imagine les moines cisterciens qui ont creusé cet aqueduc pour alimenter l'abbaye et ses dépendances au 12ème siècle. Elle admire chaque fois leur courage, leur volonté, leur force. Ils ont taillé dans la roche, à flanc de montagne – parfois de façon périlleuse - cet ouvrage extraordinaire sur une longueur d'un kilomètre 700 . Il s'agissait d' amener les eaux du Coiroux en amont jusqu'au village sous l'égide du premier abbé Etienne, devenu saint Etienne.

 

Gabrielle doit se dépêcher. Sœur Cécile l'a chargée d'aller dans les bois cueillir du muguet pour fleurir l'abbatiale d'Obazine et le tombeau du saint qui y repose. Elle aime bien Sœur Cécile. La religieuse comprend la jeune fille farouche et volontaire qui a une passion pour la solitude. Quand elle le peut, elle la charge de tâches lui permettant de s'éloigner un peu de l'orphelinat et Gabrielle lui en sait gré. Une autre raison préside à leur bonne entente. Sœur Cécile enseigne la couture et Gabrielle sait au fond d'elle qu'elle sera couturière plus tard, comme sa mère. Mais elle sera riche se jure-t-elle pour prendre sa revanche sur la misère qui l'a conduite en ces lieux austères.

 

Tout en ramassant les fragiles clochettes fleurissant abondamment sur le puy de Pauliac, Gabrielle rêve. Un jour, elle coudra des vêtements confortables pour les femmes. Et pourquoi pas des pantalons se dit-elle ? Pas très féminins mais tellement pratiques. Elle regarde sa tenue d'orpheline : jupe noire et chemisier à col blanc. Contrairement à ses compagnes préférant les teintes plus gaies, elle trouve ces couleurs sobres très élégantes. Et puis, et puis, elle aura sa marque, sa propre marque. Elle sort de sa poche un mouchoir blanc sur lequel elle a dessiné puis brodé les motifs des vitraux du 12ème siècle de l'abbatiale. Durant les longues messes, l'adolescente laisse son esprit s'évader. Son regard embrasse les ornements vitrés, aux « c » entrelacés et elle y voit son avenir. Leur géométrie simple lui plaît. Ce sera sa griffe, son emblème.

 

La jeune fille dévale le sentier de chèvre pour rejoindre l'orphelinat. Le long du ruisseau elle a ramassé une brassée d'iris jaunes et elle a complété sa cueillette par des roses de mai au jardin du monastère. Son panier embaume. Lui vient alors l'idée d'un parfum qui accompagnera ses futures toilettes. Il sera célèbre et célébré. Elle le veut. Elle a une foi indéfectible en elle. Et comme jamais personne ne lui souhaite son anniversaire, le 5 mai, aujourd'hui justement, elle décide sur le champ qu'il se nommera numéro 5. Un beau cadeau qu'elle se fera à elle-même tous les jours puisqu'elle le portera.

 

Le destin de Mademoiselle Chanel est en marche.

30 juillet 2024

Attention, ça glisse !

Attention, ça glisse !

 

 

La semaine dernière j'ai conduit Ernest, mon petit fils de 4 ans au gouffre de la Fage près de Brive.

L'intention était de lui faire admirer les richesses minérales et végétales de cet abîme situé sur le causse corrézien, à 25 mètres de profondeur. Stalactites, stalagmites, colonnes, draperies aux riches couleurs roses rouille gris cendré, cascades pétrifiées, orgues, tout plonge le visiteur dans un univers merveilleux. La Nature enchanteresse et fantaisiste a sculpté le calcaire lui donnant parfois des formes étranges et fantasmagoriques. L'imagination a ici libre cours. Mon petit garçon, fasciné, a réagi en voyant des personnages - notamment le père Noël ! - ou des animaux dans les concrétions.

 

Mais s'il n'est jamais trop tôt, à mon avis, pour montrer à un enfant les trésors des profondeurs, qu'ils savent d'ailleurs apprécier, il ne faut pas que cela dure trop longtemps. Heureusement la crypte recèle d'autres surprises.

 

L'une d'entre elles, et pas la moindre, concerne un petit animal entouré de mystère et longtemps considéré comme porte malheur : la chauve-souris. Le gouffre, classé Natura 2000 en abrite une dizaine d'espèces soit environ 14000 sujets qui habitent ici en permanence. En période d'hibernation il peut y en avoir beaucoup plus. D'ailleurs une partie de l'aven est restée intacte pour assurer leur protection. Nous avons pu en admirer accrochées aux parois mais le plus drôle pour Ernest était de les voir voler subrepticement et silencieusement au-dessus de nos têtes.

 

Il a suffi que quelqu'un, devant nous, s'exclame «  attention, ça glisse » pour transformer les galeries aménagées du parcours en terrain de jeu pour Ernest. Sitôt ouï, sitôt expérimenté ! Chouette, ça glisse ! C'est dire que pendant le restant de la visite, j'ai dû cramponner mon gaillard pour éviter qu'il se casse une jambe. Je n'ai pas vu grand chose du gisement paléontologique. A peine ai-je pu poser ma main au passage sur la molaire de mammouth enchâssée dans le calcaire. Seule entorse au règlement qui stipule que l'on doit déambuler sans toucher les parois. On ne peut pas louper cette caresse : il paraît que la dent énorme porte bonheur !

 

9 juillet 2024

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